Emailler :V. Parsemer quelque chose de détails qui en rompent la monotonie (larousse)

Les vitrificables ou la peinture émail

Les vitrificables ou la peinture émail

Une lectrice de Picardie me demandait ce matin « J’ai des pots tout petits, ça ressemble à de l’émail mais en même temps ça a l’air différent, quoi qu’est-ce ??? »

Je tiens donc à préciser: si vous avez des pots petits, avec une poudre plus fine que de l’émail classique, il se pourrait que vous ayez récupéré des…

VITRIFICABLES !!!!

Les vitrificables ne sont pas des émaux comme les autres. Utilisés dans la technique de peinture émaillée en miniature (voir l’article) ou dans la technique de la grisaille au blanc de Limoges (voir l’article), ils sont souvent présentés dans des petits pots et ont une granulométrie beaucoup plus fine que les émaux classiques qui se rapproche de la texture de la farine.

Petits pots de vitrificables de mon atelier dans leur charmantes boîte en bois, avec la palette de dégradé et la plaque de verre où j'entrepose les "peintures"

Petits pots de vitrificables de mon atelier dans leur charmantes boîte en bois, avec la palette de dégradé et la plaque de verre où j’entrepose les « peintures »

On les appelle vitrificables en espagnol, painting enamels en anglais. Je ne sais pas si ils ont un nom officiel en France.

Différence entre un émail classique et un vitrificable

Les émaux classiques sont souvent vendu en poudre. Ce sont des verre avec des oxydes qui ont été fondu puis réduit en poudre autour de 80-mesh (voir l’article sur la granulométrie pour savoir ce qu’est le mesh). Les émaux sont ensuite appliqués en les mélangeant avec de l’eau distillée et ont une texture sableuse.

Au contraire, les vitrificables sont des mélanges d’oxydes avec très peu de verre qui n’ont jamais subit de cuisson. Ils ont un mesh autour de 325 et sont donc beaucoup plus fin. Pour les appliquer, on les mélange à une huile pour obtenir une pâte qui a à peu près la même texture que la peinture à l’huile. Ils s’appliquent ensuite plus comme une peinture, au pinceau ou à l’aiguille si l’ont veut faire un travail très fin. Le blanc de Limoges utilisé en grisaille est un vitrificable.

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Les mélanger avec une huile avant application

On peut utiliser plusieurs huiles pour faire le mélange :

  • Huile de lavande (utilisée au 16ième siècle)
  • Huile de rose (utilisée au 16ième siècle)
  • Huile ou essence de térébenthine (couramment utilisée de nos jours)
  • Paraffine (couramment utilisée de nos jours)
  • Eau distillée avec de la colle (donne une texture et un rendu plus aquarelle)

Le critère de sélection d’une huile est sa capacité ou non à s’évaporer. La térébenthine par exemple s’évapore très vite. Avantage : on peut corriger en grattant le blanc certaines zones, on peut ajouter des détails à l’aiguille. Inconvénients : on ne peut plus retoucher à une zone qui a séchée. Si on y retouche, on risque d’obtenir des bulles lors de la cuisson. La paraffine au contraire de l’essence de térébenthine ne sèche pas. Il est donc possible de rectifier facilement le dessin mais, avec le temps, l’huile s’étale et le tracé perd en précision. Donc, il faut choisir le liant en fonction de ses besoins.

Il est fortement déconseillé de mélanger les huiles sur une même plaque. Il est préférable de réaliser les détails avec du vitrificable mélangé à de la térébenthine puis de cuire avant de diluer d’autres couleurs dans de la paraffine pour terminer le dessin par exemple.

(une photo de la dépose des vitri sera bientôt disponible…pour l’instant, j’en ai pô… la seule idée que vous pouvez vous faire c’est en regardant la première photo où on voit les « peintures », le mélange du vitri avec de l’huile)

On peut aussi utiliser des oxydes purs par dessus. Attention néanmoins à leur toxicité mais ils peuvent s’appliquer pur sur une couche préalable d’émail. Après cuisson, ils seront fixé dans l’émail.

Attention à la cuisson

Les vitrificables ne se cuisent pas comme des émaux. Pour les émaux, on attend que l’eau s’évapore puis on peut passer la pièce au feu quelques minutes.

Comme les vitrificables sont mélangés à une huile, il faut qu’elle brûle avant de cuire la pièce. Pour cela, il est conseillé de laisser la pièce sécher à l’air libre puis sur le four. Avant de la cuire, il est nécessaire de faire des allers-retours dans le feu pour que l’huile brûle entièrement. Ne la laissez pas trop longtemps pour éviter l’apparition des flammes, ça risquerait d’abîmer le dessin que vous venez patiemment de faire pendant 5h. Lorsque la couleur de la pièce est entièrement marron (ne paniquez pas, les couleurs reviendront) et qu’il n’y a plus de fumée qui s’échappe de la pièce, elle peut être laissée dans le feu quelques minutes.

Si vous avez mélangé vos vitrificable avec de l’eau et de la colle pour un rendu plus aquarelle, c’est pareil. Veillez à ce que la colle brûle doucement avant d’enfourner votre pièce.

Attention car les vitrificables cuisent rapidement et s’effacent lorsqu’ils sont surcuits. Surveillez bien la cuisson !

(photo de cuisson bientôt disponible)

Quelques artistes ayant utilisé la technique de l’émail peint et des vitrificables

Léonard Limosin (1505 – vers 1577) (bientôt je ferai un article sur lui)

Portrait de Anne de Montmorency, connétable de France par Léonard Limosin, 1556, émail peint sur cuivre, Paris, musée du Louvre, Le cadre est d'origine. H: 72cm

Portrait de Anne de Montmorency, connétable de France par Léonard Limosin, 1556, émail peint sur cuivre, Paris, musée du Louvre, Le cadre est d’origine. H: 72cm

Henri Toutin (1578 – 1644) (j’ai écris un article sur la pièce suivante ici)

 

Médaillon en émail vitrificables sur or par Henri Toutin, 1637, H: 4,9cm, British Museum

Médaillon en émail vitrificables sur or par Henri Toutin, 1637, H: 4,9cm, British Museum

Patek Philippe, horloger contemporain

 Patek Philippe Souvenir de Mortefontaine - Montre de poche réalisée en 2006 d’après un tableau de Jean-Baptiste Corot ; émail de Suzanne Rohr peint en 1996 et or jaune.

Patek Philippe Souvenir de Mortefontaine – Montre de poche réalisée en 2006 d’après un tableau de Jean-Baptiste Corot ; émail de Suzanne Rohr peint en 1996 et or jaune.



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Une réponse

  1. Giraudeau dit :

    Merci pour votre article très détaillé. Je n’ai pas encore pris le temps de faire des photos ou de nouveaux essais.
    je fais ça bientôt.
    les exemples de pièces anciennes sont tout simplement magnifiques.
    A bientôt.

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